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La celtisation de la péninsule Ibérique à la lumière de la toponymie et de la Celtic from the West hypothesis: Avec des regards sur l'indo-européanisation de l'Europe.

Timmermann, Jörg
In: Zeitschrift für Romanische Philologie, Jg. 138 (2022-03-01), Heft 1, S. 228-244
Online academicJournal

La celtisation de la péninsule Ibérique à la lumière de la toponymie et de la Celtic from the West hypothesis: Avec des regards sur l'indo-européanisation de l'Europe 

The central aim of this paper is to trace back the celtization of the Iberian Peninsula, mainly on the basis of toponymic evidence. On this basis, there is evidence for two waves of celtization. As we shall see, the manifestation of Celtic in the south-western part of the peninsula is more consistent with the Celtic from the West hypothesis than with the traditional viewpoint that the Celts came exclusively from Central Europe. In this connection, special attention is paid to the putative celticity both of the Tartessian language and of the suffix -essos. Likewise, Renfrew's hypothesis that Indo-European originated in Asia Minor is in full harmony with the apparent origin of -essos in Asia Minor.

Keywords: briga; dunum; Celtic from the West hypothesis; Tartessos; Artiés; -essos; Indo-Europeanization; Anatolian hypothesis (Renfrew); indo-européanisation; hypothèse anatolienne (Renfrew)

1 Introduction

Cette contribution se propose de suivre les voies par lesquelles le celtique est venu s'implanter dans la péninsule Ibérique, notamment sur les traces de la toponymie. Il s'avérera que l'idée traditionnelle selon laquelle les Celtes seraient venus exclusivement en provenance du nord, c'est-à-dire en franchissant les Pyrénées, n'est pas nécessairement la voie à suivre (Celtic from the West hypothesis). Chemin faisant, le fait que l'étude étymologise le suffixe -essos, que l'on retrouve souvent dans la toponymie des Pyrénées, conforte par ailleurs cette dernière hypothèse. Et, faisant chronologiquement un pas en arrière supplémentaire, notre étude toponymique contribue même à clarifier la perspective sur l'indo-européanisation de notre continent.

2 Les toponymes en -briga et -dunum

2.1 Dans l'étude de la toponymie celtique de la péninsule Ibérique, l'intérêt des chercheurs a porté tout particulièrement sur la répartition de deux éléments, les toponymes en -briga et en -dunum. La géographie de leur répartition est, surtout pour -briga, des plus caractéristiques : elle repose essentiellement sur la bipartition préhistorique de la Péninsule marquée par une ligne qui court approximativement de la ville actuelle de Huelva jusque dans le golfe de Gascogne ([48] 1995, 739). Cette ligne partage ainsi deux aires linguistiques historiques : une aire celtique, dite celto-ibérique, à l'ouest, et une aire principalement ibérique, à l'est, toutes les deux identifiables en raison de données toponymiques (-briga vs ili-, ilu-, t). Si les noms en -briga se retrouvent à peu près sur l'ensemble de la zone celto-ibérique, il n'en va pas de même des noms en -dunum à l'intérieur de la zone ibérique. Leur aire de répartition est, par rapport à -briga, beaucoup plus exiguë. Strictement limitée au versant méridional des Pyrénées, elle est confinée l'extrême nord de cette zone. Elle n'est donc nullement en corrélation directe avec la ligne décrite.

Ladite ligne se voit également confirmée par des trouvailles épigraphiques (écriture ibérique et latine pour le celtibère vs écriture ibérique, grecque et latine pour l'ibère) (cf. [48] 1995, 739, fig. [108.2]).

Les noms de lieux en -briga respectent cette limite orientale, ne la dépassant à l'est qu'exceptionnellement : dans les cas de Berga (Barcelone), de Bergúa (Huesca) et éventuellement dans ceux de Berja (Almería) et de Broto (Haut-Aragon, écrit : Bergoto en 1120, cf. OC 2, 462 s.v. Berga). Il ne passera pourtant pas inaperçu que la celticité des toponymes précités est discutable (OC 2, 461‒462 s.v. Berga) : à côté de l'étymologie celtique qui semble être la plus vraisemblable, Coromines admet, au moins pour Berga, la possibilité d'une origine sorothaptique (OC 2, 461 s.v. Berga).

De même que les noms en -briga, ceux en -dunum sont peu nombreux à franchir cette limite : Menéndez Pidal, dans une communication personnelle à Bonfante (cf. [2] 1944, 383, N3), présente Arialdunum et Esttledunum (les deux en Bétique, l'actuelle Andalousie). D'autres toponymes tels Valduno (Asturies) et Villardún (Santander) présentés ici sont remis en question par Menéndez Pidal lui-même.

2.2 Les éléments celtiques -briga et -dunum étant essentiellement synonymiques, désignant des forteresses sises sur une hauteur ([39] 1954, 105), l'on en vient à se poser la question sur leur différence. Celle-ci, n'étant pas sémantique, Rix (ib.) arrive à la conclusion qu'elle ne peut être que chronologique : « es bleibt also nur die chronologische Differenz ». D'autres chercheurs dont [36] (1973), [47] (1977, 121) et moi-même ([42] 2015, 625‒626) s'accordent également pour y voir une différence chronologique. [36] (1973, 173) conclut :

A study of [...] Celtic place-name types – those ending in -dunum, [...] and -briga – has shown that [...] -briga names alone reach Iberia and so appear to represent an early linguistic stage.

Cela reviendrait à dire que les deux types toponymiques seraient imputables à deux vagues de celtisation différentes.

À l'opposé de cela, selon [34] (2012, 178ss.), une telle différenciation chronologique est loin d'être concluante, puisque premièrement le fait de trouver des aires où les toponymes en -briga et -dunum coïncident (comme en Gaule) (cf. [39] 1954, 105) ne s'opposerait aucunement à leur distinction sémantique. En effet, [22] (1984) et [21] (2000) ont trouvé des aires où plusieurs éléments toponymiques ‒ initialement interprétés comme synonymiques ‒ ont fini par montrer des différences sémantiques très subtiles, p. ex. dūn, berg, hyll, tous 'colline'. Deuxièmement, la coïncidence géographique de -briga et de -dunum en Gaule ne s'opposerait pas non plus en principe à une différence d'ordre dialectale puisque les dialectes, loin d'être des entités géographiquement clairement délimitées, présentent, au contraire, des intersections géographiques ([34] 2012, 179). Toutefois, au dire de Rix (ib.), la répartition de -briga et de -dunum en Gaule serait semblable au point de ne laisser entrevoir aucune différenciation dialectale (diatopique).

1. La clé qui nous permettra entre autres de distinguer -briga et -dunum chronologiquement réside dans le fait que l'aire de répartition de -briga correspond en même temps à la région dont – selon les sources historiques – nous disposons des plus anciennes attestations de présence celtique (cf. [42] 2015, 626) :

Respecto al Centro y Oeste de la Península, las primeras noticias claras de los historiadores antiguos y los hallazgos de la moderna arqueología atestiguan inmigraciones indoeuropeas que, procedentes de la Europa central, comenzaron con el primer milenio antes de nuestra era y se sucedieron durante varios siglos. [...]. En el siglo VI pueblos célticos habían llegado hasta Portugal y la Baja Andalucía, y estaban ya instalados allí; a ellos se refiere, hacia el año 445, Heródoto de Halicarnaso, en dos pasajes, donde por primera vez consta de manera fidedigna el nombre de celtas (Lapesa 1981, 16).

2. S'y ajoutent des arguments de poids d'ordre géo-linguistique : à ce sujet, regardons de plus près la fig. [1] (cf. annexe) qui appelle – à ce que je vois – au moins trois commentaires :

(i) il ne serait pas plausible de penser que les noms en -briga se seraient introduits dans la Péninsule par le « chemin classique », c'est-à-dire, par le nord : on constate en effet que la zone de plus grande concentration se situe dans la Péninsule elle-même et que leur densité en Gaule est beaucoup plus restreinte. L'inverse s'observe pour les noms en -dunum : leur densité maximale se retrouve en Gaule ce qui indique une colonisation de la Péninsule en provenance du nord (cf. p. ex. fig. [8.3] chez [34] 2012, 178).

(ii) De même le réseau des toponymes en -briga est beaucoup plus dense à l'intérieur de la Péninsule que ceux en -dunum, limités, quant à eux, à l'extrémité nord-est. Il serait donc injustifié de supposer que les noms en -dunum seraient antérieurs, dans la Péninsule, à ceux en -briga.

(iii) En plus, les toponymes en -briga sont absents sur une bande de terre s'étendant de l'Èbre jusque très loin à l'intérieur de la Gaule. Au cas où les noms en -briga seraient venus par le nord, on devrait s'attendre, au contraire, à les retrouver directement de part et d'autre de la limite entre la Gaule et la Péninsule.

En définitive, une analyse géo-linguistique des toponymes en -briga suggère clairement que les noms en -briga ont leur origine dans la péninsule Ibérique elle-même et sont, en conséquence, antérieurs à -dunum. Ainsi, il s'agit de deux couches de celtisation différentes.

2.3 Une datation des deux vagues d'immigration celtique est-elle possible ? La citation de Lapesa (cf. supra) en présente déjà une, à savoir le VIe siècle av. J.-C. pour la présence de Celtes dans la région caractérisée par les noms en -briga (Basse Andalousie, Portugal). J'y reviendrai ultérieurement. Cette datation doit donc être considérée comme terminus ante quem par rapport au peuplement celtique.

Pour ce qui est des noms en -dunum, j'ai déjà suivi, dans [42] (2015), la voie de [2] (1944) selon lequel une branche des Gaulois Catalauni se serait établie dans l'actuelle Catalogne, d'où le nom de Catalogne (< Catalauni). Cette théorie repose essentiellement sur l'existence en Catalogne de noms de lieu en -dunum, dont Besalú, Verdú, Berdún et Salardú, etc. ([2] 1944, 383). Le fait que la zone de densité maximale des toponymes en -dunum se retrouve en Gaule septentrionale semble appuyer cette hypothèse ([2] 1944, 384 N2). Ayant trouvé d'autres ethnonymes gaulois et celtiques qui ont probablement laissés leur empreinte dans la toponymie de la région, j'ai élargi l'hypothèse initiale de Bonfante: ainsi, l'ethnonyme du peuple ibérique des Suessetani remonte – semble-t-il – aux Gaulois Suessiones. Selon une observation de [7] (1973, 265) la ville de Salàs, autrefois Salassi doit son nom au peuple celtique des Salasses (cf. aussi [5] 2009, 688 s.v. Salas Pallás). À cet égard, le lecteur n'est certainement pas sans s'étonner de lire chez Coromines (OC 3, 336) que dans la toponymie de la Catalogne ne figure aucun nom de lieu formé à partir d'un nom de tribu celtique.

L'histoire de la Gaule connaît, à son tour, au moins deux vagues d'émigration :

  • i) une vague d'émigration vers l'Italie est attestée au tournant des V e et IV e siècles av. J.-C. ([29] 2007, 43 ; [27] 2000, 188) ;
  • ii) entre les I er –III e siècles av. J.-C. divers peuples belges auraient émigré vers la Bretagne (donc l'actuelle Grande-Bretagne) (DNP 6, 391).

Comme il ne s'agissait pas là de peuples isolés, mais de groupement de plusieurs peuples, il paraît plausible de considérer les émigrations gauloises vers le nord-est de la Péninsule comme historiquement liées à l'une de ces deux vagues. Il s'agirait donc uniquement de la branche secondaire de la vague d'émigration principale.

2.4 La présence des Catalaunes dans le nord-est de la péninsule Ibérique se justifierait non seulement par la proximité phonique entre leur ethnonyme et le coronyme Catalogne – mais encore par le fait que le pays d'origine des Catalaunes, la région située aux alentours de la Marne, a vu l'exode de la plus grande partie de sa population (cf. [44] 2021) :

But sometimes about 400 BC the population suddenly declines. Thereafter, only one major focus developed, in the Reims area, while much of the rest of the Champagne region appears to have been deserted (Cunliffe 1997, 75).

Apparemment, la date de cet exode montre une bonne corrélation avec la migration vers l'Italie supérieure (future Gallia cisalpina) au tournant des Ve et IVe siècles av. J.-C. ([29] 2007, 43 ; [27] 2000, 188) : il serait donc plus plausible de voir dans les porteurs des toponymes en ‑dunum principalement une branche secondaire de l'immigration gauloise dans la péninsule Italique, probablement composée d'une majorité de Gaulois Catalauni.

Concluons : si les toponymes en -briga remontent, selon toute apparence, au VIe siècle, voire à une période antérieure, ceux en -dunum se situent, semble-t-il, autour du IVe siècle. Il s'avérera encore, au cours de cette étude que la datation des noms en -briga réclamera une rectification supplémentaire (cf. 2.7).

2.5 Quant à la provenance des deux vagues de migration, l'idée suivante émerge clairement : la vague des porteurs de la civilisation qui ont fondé des localités en -dunum vient indubitablement de la Gaule septentrionale (zone de densité maximale de ce type toponymique, localisation des tribus impliquées). Les Celtes se seraient quant eux établis en Gaule autour du Ve siècle av. J.-C. venant d'Europe centrale (v. [50] 1993, 21). Le flux de ces migrations se conformerait en cela à la conception traditionnelle :

  • (i) Conventional theories hold that Celtic languages developed in central Europe from a form of Indo-European [...] ([32] 2009, 29).
  • (ii) Traditional belief, still widely held, is that the Celts originated somewhere in western central Europe, to the north of the Alps, and from there, in succession of movements over many centuries, spread westwards into Iberia, Britain and Ireland, southwards to the Po valley and the Italian peninsula and eastwards to the Carpathian Basin, Transylvania, the Ukraine, the Balkans eventually reaching Anatolia ([10] 2012 b, 13).

Si les noms de lieux en -dunum confirment ainsi l'hypothèse traditionnelle, nous avons déjà constaté qu'il n'en va pas de même pour les noms en -briga. En fait, ces anomalies des noms en -briga par rapport à la conception classique d'après laquelle l'invasion celtique vient par le nord trouveront une meilleure explication dans le cadre théorique de la Celtic from the West hypothesis. Il s'agit là de tout un ensemble de travaux proposés par un cercle de spécialistes pour la plupart britanniques. Formé autour de l'archéologue Barry Cunliffe et du linguiste John T. Koch, ce cercle a travaillé de façon interdisciplinaire en vue de mieux répondre aux déficits de la théorie classique. [24] (2012, 41) expose le projet succinctement comme suit :

More recently, a 'new' model has been proposed, mainly by Barry Cunliffe (2001, 293-7 and this volume [= Cunliffe 2012 a, 2012 b, J.T.]) and John Koch (2009 and this volume [= Koch 2012, J.T.]). This 'Celticization from the West' model differs from the 'traditional' model in the proposed area and time of 'origin' for 'the Celts', putting it firmly along the 'Atlantic fringe' of the European continent. Communication networks in this area provide evidence for substantial exchange of ideas between the communities inhabiting the Atlantic coasts of Europe, from the south-western corner of the Iberian Peninsula to Ireland in the north-west.

Cette réorientation théorique représente même ce que [26] (2012) propose de qualifier de « paradigm shift ».

2.6 En plus, le fait d'avoir trouvé que le tartessien représente, lui aussi, une langue celtique (cf. [25] 2009 ; 2012) est en harmonie parfaite avec l'état actuel des recherches localisant les plus anciennes manifestations du monde celtique précisément dans le sud-ouest de la péninsule Ibérique. Cette nouvelle perspective s'insère, de ce fait, elle aussi, à la perfection dans le cadre théorique de la Celtic from the West hypothesis.

2.7 L'observation selon laquelle les noms de lieux en -briga, à la celticité non-contestée, se retrouvent dans le voisinage immédiat de Tartessos plaide, elle aussi, en faveur de la théorie celtique de Koch. Dans cette optique, il ne faut pas non plus perdre de vue qu'il est vraisemblable que la partie méridionale de l'actuelle province portugaise de l'Alentejo (Portugal méridional) appartenait aussi à l'époque au territoire de Tartessos : en fait, l'on y a trouvé de nombreuses stèles portant des inscriptions en tartessien (cf. [23] 2012 et en particulier la carte p. 79) et que c'est précisément ici que les noms en -briga se retrouvent également (cf. fig. [1]). Ceci suggère de devoir appréhender les noms en -briga dans le contexte historique de Tartessos et de les replacer dans leur chronologie qui est plus ou moins celle du début de Tartessos, datable de la deuxième moitié du deuxième millénaire av. J.-C. environ, selon [30] (2004, 195 s.v. _I_Tartessisch_i_).

Cette vue s'impose d'autant plus que dans le cas des noms en -briga, il ne s'agissait pas de villes mais simplement de tours sur une hauteur à vocation uniquement militaire ([16] 2012, 23). On sait que les côtes atlantiques de la péninsule Ibérique servaient depuis longtemps de voies commerciales communiquant avec les îles Britanniques. C'est ainsi que [12] (1997, 42) caractérise « the western fringe of Europe, facing the Atlantic » comme suit :

Here in a broad arc, stretching from Scotland to south western Iberia, the maritime communities were linked in a complex of exchange networks probably stretching back in time at least to the Neolithic period.

Le fait que géographiquement les sites dudit nom longent immédiatement la côte occidentale de la Péninsule ainsi que les principaux fleuves qui s'y jettent, à savoir le Tage, le Douro et le Minho (cf. annexe fig. [1]), me porte à croire que les sites du nom de -briga servaient à la protection desdites voies commerciales.

2.8 Pour ce qui est de la chronologie des noms en -briga, lesdits noms ont déjà atteint – semble-t-il – la partie septentrionale de la Péninsule très peu de temps après leur apparition : c'est qu'en celtique briga connaît deux acceptions : « 'colline, mont' > 'forteresse' » ([15] 2003, 86 s.v. briga) dont le sens de 'colline, hauteur' serait primaire : « ce mot a servi, par métonymie, à désigner la fortification installée à son sommet, [...] » ([16] 2012, 23). Dans cette perspective, le nom de la rivière Brexa ([35] 2008, 114), affluent en rive gauche du Mero, est révélateur. Située dans la montagne, c'est très certainement le sens primaire qui est en jeu ici : il en découle que le sens de base est encore en usage au moment où briga atteint le nord.

2.9 Si l'on revient à la chronologie encore provisoire du §2.4, l'on pourrait dès lors distinguer, sur la base de -briga et de -dunum, deux vagues de celtisation de la Péninsule. La première serait signalée par briga et ne peut être située que très approximativement entre le XVe et leXe siècles av. J.-C. ([30] 2004, 195 s.v. Tartessisch) ce qui nous permettra par rapport à 2.4 de faire remonter ces noms encore plus loin dans l'histoire. Ignorant jusqu'ici son origine, je qualifie cette vague de celtisation, encore de façon imprécise, d'« immigration celtique ». À l'opposé de cela, l'origine de la deuxième vague qui a apporté dunum peut être précisée ; elle s'appellera, de ce fait, « immigration gauloise » se situant autour du IVe siècle av. J.-C. Sous forme de synopse, nos résultats se résument désormais comme suit :

Tableau 1

datationcentre de densité maximale dans la péninsule Ibériquetoponyme indicateurorigine
immigrationceltiqueXVe s.-Xe s. av. J.-C.le sud-ouest de la Péninsule-briga?
immigration gauloiseIVe s. av. J.-C.l'extrémité nord-est de la Péninsule-dunumGaule

3 Les toponymes en -essos

3.1 Les localités en -briga étant, selon toute vraisemblance, des fondations d'ordre militaire, il serait intéressant de savoir, pour évaluer l'amplitude de la colonisation de Tartessos, s'il y a d'éventuelles traces d'une colonisation civile. En quête d'autres traces de Tartessos dans la péninsule Ibérique, une observation de [41] (1956b, 117) selon laquelle les toponymes formés sur ‑iés prolongeraient -essos, donc précisément le suffixe que nous retrouvons dans le nom de Tartessos, nous met sur la bonne piste car

si notre suffixe devait survivre dans l'Espagne moderne sur le domaine de la langue castillane, il devrait apparaître sous la forme -ieso ou -iés avec la même diphtongaison qui fait changer festa en fiesta, sessus en sieso et transversus en travieso.

Effectivement, le suffixe -iés est très répandu dans la toponymie des Pyrénées et de ses environs : Rohlfs signale toute une série de toponymes en -iés, donc issus de -essos qui, à côté de quelques exemples en France, sont tous localisés en Espagne. Du côté espagnol, rien que pour -iés, on trouve, d'après [41] (1956b, 118–126) : Aniés (Huesca), Apiés (Huesca), Arbaniés (Huesca), Artiés (Lérida), Asiés (Huesca), Binaniés (Huesca), Bandaliés (Huesca), Biniés (Huesca), Igriés (Huesca), Ipiés (Huesca), Lardiés (Huesca), Sandiniés (Huesca), Señiés (Huesca), Urriés (Saragosse).

3.2 Tout cela évoque l'idée selon laquelle du temps de Tartessos, lesdites localités dans les Pyrénées étaient historiquement étroitement liées à Tartessos. Les Pyrénées ont-elles connu une vague de celtisation à cette époque ? Ces localités marquaient-elles l'intérêt qu'a eu Tartessos de prospecter les Pyrénées en quête de minerai ? Ou bien s'agissait-il de jeter les bases commerciales permettant d'entrer en contact avec la population locale ? Ou bien leur fonction primaire était-elle de faire démarrer le commerce transpyrénéen ?

3.3 Si pour [41] (1956b, 126), il est difficile « dans ces limites [...] de discerner le groupe ethnique auquel l'emploi et la propagation de notre suffixe doit être attribué » et qu'il « a l'impression qu'elle appartient à une couche antérieure à la domination gauloise », c'est que jusqu'ici il manquait le point de repère auquel on aurait pu rattacher -essos : mais avec la vraisemblable celticité de Tartessos, le lien historique et chronologique desdits noms avec Tartessos devient dès lors évident. En fait, Rohlfs était déjà sur la bonne piste car (comme -briga) les toponymes en -essos appartiennent – en accord avec nos résultats – à une couche antérieure à la couche gauloise.

4 L'origine de la vague celtique et la question de l'indo-européanisation de l'Europe

4.1 Le moment est maintenant venu de traiter la question de l'origine de la vague celtique. Pour ce faire, ladite étude de [41] (1956b) me semble une nouvelle fois indiquer la voie à suivre : en fait, il est très significatif que le suffixe -essos que l'on retrouve aussi dans Tartessos trouve sa densité maximale en Asie Mineure. L'on se rappellera, dans cette optique, que ce suffixe est particulièrement fréquent dans l'ancienne toponymie d'une vaste zone qui va de l'Asie Mineure en passant par la Grèce et l'Italie méridionale jusque à la péninsule Ibérique. [41] (1956b, 117) énumère toute une série de toponymes formés sur -essos dont Tartessos. Sous forme synoptique, l'on trouve ici :

ASIE MINEURE : Assessos, Artymnessos, Karmylessos, Koressos, Lyrnessos, Pyrmnessos, Syessa, Tegessos, Telmessos, Termessos, Thyessos, Titaressos, Tymnessos

GRECE : Argessos, Brilessos, Hymessos, Keressos, Lykabessos, Marpessa, Mykalessos, Teumessos

ITALIE MERIDIONALE : Herbessos, Suessa, Tylessos

BALKANS SEPTENTRIONAUX : Odessos, Ordesssos, Salmydessos

PENINSULE IBERIQUE : Tartessos

4.2 D'où cette vague vient-elle ? La recherche de la lointaine origine de cette vague de celtisation – à moins de vouloir se contenter de Tartessos comme point de départ – nous incite à adopter une perspective encore plus vaste, à savoir celle de l'indo-européanisation de l'Europe : vraisemblablement, les toponymes en -essos sont révélateurs à ce sujet : dans la recherche du berceau géographique des langues indo-européennes (= LIE), donc de l'aire linguistique du proto-indo-européen (PIE) (qui marque le point de départ commun de toutes les langues qui relèvent de cette famille linguistique), deux théories se sont imposées principalement ([31] 2010, 16‒21) :

i) l'hypothèse kourgane

Cette théorie, proposée par l'archéologue Marija Gimbutas, est soutenue actuellement par la majorité des spécialistes. Elle place le foyer des LIE dans la steppe pontique coïncidant avec une zone où les kourgans sont nombreux, d'où le nom (cf. p. ex. la carte fig. [5.1] dans Anthony 2007, 84). Il s'agit là de tumulus recouvrant les sépultures de la classe dirigeante. Le mot kourgan est d'origine tartare.

ii) l'hypothèse anatolienne

Selon cette hypothèse, présentée par Renfrew, les LIE trouveraient leur origine en Anatolie. Leur expansion vers Europe serait liée à la révolution néolithique : « the earliest Indo-European dispersal is to be equated with the dispersal of farming from Anatolia to south-east Europe » (Renfrew 2003, 25).

À mesure que l'on se conforme à l'interprétation du tartessien comme celtique, à l'instar de Koch, et à considérer -essos comme celtique ou du moins comme indo-européen, la répartition géographique des toponymes en -essos en dit long sur l'origine des langues indo-européennes, leur aire de densité maximale se trouvant apparemment en Anatolie (cf. 4.1) : cette coïncidence avec la zone que [37] (1987 ; 2003 ; passim) présente comme le berceau des langues indo-européennes, constitue, à n'en pas douter, un argument de poids en faveur de l'hypothèse anatolienne.

Ajoutons que la localisation de l'indubitable aire celtique du coin sud-ouest de la Péninsule ‒ que ce soit celle de Tartessos ou bien celle des premiers Celtes attestés par Hérodote ‒ est, elle aussi, géographiquement en meilleure harmonie avec une origine anatolienne qu'avec celle des steppes pontiques. Par ailleurs, le chemin déjà signalé par les toponymes en -essos, à savoir en passant d'est en ouest à travers le bassin méditerranéen (4.1), ne préfigure-t-il pas le chemin de ces premiers Indo-Européens ?

4.3 L'étymologie celtique de -essos s'impose d'autant plus que j'ai pu montrer sur l'exemple du nom de la ville d'Artiés ([42] 2015, 619‒622) que le premier membre du toponyme remonte apparemment au celt. artos 'ours', plutôt qu'au basque : il s'ensuit que le suffixe, lui aussi, est probablement celtique.

À l'appui de cette présumée étymologie celtique, on peut avancer également que le celtisant Xavier [16] (2012, 21 ; 2017) présente un suffixe aussi celtique, de filiation indo-européenne assurée, formellement équivalent à -essos : indo-européen *-sth2-o- > vieux celtique -sto-, -sso-, -xo-. Il en va de même du côté sémantique : ce suffixe est présenté par [16] (2012, 21) avec le sens de 'où se tient X', cette valeur locative correspond exactement à celui que j'ai attribué à Artiés : 'lieu que l'ours fréquente' ([42] 2015, 619‒620).

4.4 Une pièce de puzzle s'inscrit encore très harmonieusement dans le tableau de la vraisemblable celticité de Tartessos : dans les avatars des rivalités avec les Carthaginois en lutte pour l'hégémonie dans la région, ces derniers l'emportent sur Tartessos, au cours du VIe siècle av. J.-C. (DNP 12/1, 40 s.v. Tartessos).

Sous cet angle, il est frappant de voir que la localisation géographique des premiers Celtes que nous donne Hérodote (vers 445), c'est-à-dire le coin sud-est de la Péninsule, coïncide, semble-t-il, dans une très large mesure avec le territoire de Tartessos, à savoir : principalement avec la vallée inférieure du Guadalquivir et la zone d'Huelva et alentour (DNP 12/1, 39 s.v. Tartessos). C'est précisément ce que l'on appelle la Basse-Andalousie ([28] 1981, cf. supra). Serait-il hasardeux, sur cette base, d'avancer l'hypothèse que ces Celtes seraient en vérités les Tartessiens que l'imminence d'une guerre contre les Carthaginois aurait incités à quitter leur ville et à se construire une nouvelle existence devant les portes de leur ancienne capitale ?

5 Conclusion

Comme dans les chantiers archéologiques, les différentes « pièces » trouvées tout au long de ce travail sont de nature différente : si certaines aident à compléter une hypothèse, d'autres ouvrent sur une nouvelle théorie. Ainsi, l'origine de -briga dans la péninsule Ibérique et la coïncidence partielle de la répartition des noms de lieu celtiques en -briga avec le territoire de Tartessos confortent l'hypothèse de la celticité de Tartessos. Sur cette base, la vraisemblable nature celtique du tartessien (Koch) m'a permis d'imputer une étymologie celtique à -iés (< -essos). L'apparente origine anatolienne du suffixe indo-européen -essos constitue un argument de poids en faveur de l'hypothèse anatolienne des langues indo-européennes. Enfin, le déclin de Tartessos est à l'origine de la théorie selon laquelle les premiers Celtes attestés précisément sur le territoire de Tartessos seraient en vérité des Tartessiens. Comme l'étude l'a fait apparaître, ce n'est que petit à petit que l'on arrive à percer les secrets de la préhistoire. L'auteur de ces quelques lignes serait satisfait d'avoir apporté une modeste contribution à cette tâche aussi fascinante qu'exigeante.

6 Annexe

Graph: Fig. [1] Les noms de lieu en -briga d'après Parsons (2012, 176 fig. [8.2]) (les noms de lieu en jaune ne sont pas localisés avec exactitude)

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Selon Corominas (DCECH 5, 314 s.v.sorótaptico), on entend par sorothaptique un dialecte indo-européen lié aux populations des champs d'urnes en provenance d'Europe centrale. Leur idiome indo-européen, tout en étant différent d'autres langues indo-européennes connues comme le celtique, le germanique, l'illyrien, etc. leur doit certains éléments de son lexique. Mais comme, selon Corominas, le sorothaptique échappe à toute identification linguistique, il a préféré de lui appliquer un terme neutre qui ne donne la préférence à aucune des langues impliquées. Le sorothaptique, quant à lui, est attesté sur les plombs sorothaptiques d'Arles. Il s'agit là de « plusieurs lamelles ou tablettes en plomb qui fournissent des inscriptions encore lisibles sur huit de leurs faces » ([8] 1975, 2). Pour une critique de cette approche, cf.[4] (2017), mais, par opposition à ce dernier, [44] (2021) et, quant à la provenance étymologique du suffixe - tanus , avant tout Timmermann (en préparation). Dans [43] (2018, 661‒662), j'ai critiqué qu'à l'encontre de ce que veut nous faire croire Bonfante, les noms en - dunum sont loin d'être nombreux en Catalogne, mais qu'ils se retrouvent, en revanche, majoritairement dans le Canal de Berdún, donc en dehors de la Catalogne. Selon [7] (1973, 214‒216), la rivière Vert conserve le souvenir du peuple celtique des Verates, originaires des environs de Vérone. Ceci est pourtant en contradiction avec [13] (1978, 95) selon qui l'hydronyme est dû à la couleur de la rivière. Ces migrations ne correspondent plus à l'idée de s'être effectuées de façon ininterrompue ; bien au contraire, on a trouvé qu'elles pouvaient s'étendre sur plusieurs générations avec des haltes plus ou moins longues ([3] 2005, 61). Rien ne s'oppose par ailleurs à l'idée que certaines parties des Catalaunes n'auraient quitté leur territoire que plus tard avec les migrations belges vers les îles Britanniques pendant les trois premiers siècles av. J.-C. (cf. DNP 6, 391). Dans [44] (2021), j'ai présenté d'autres arguments en faveur de l'hypothèse d'une immigration de Cautalaunes dans le nord-est de la péninsule Ibérique : ici même le contre-argument principal contre cette approche, à savoir la non-sonorisation de la -t- intervocalique (OC 3, 335, 337, 338 N 6) trouve une solution adéquate. Ce point de vue se trouve en général aussi reflété par les œuvres de vulgarisation : cf., à titre d'exemple, [29] (2007, 38), [18] (2007, 17‒27 et tout particulièrement p.18, carte [1]) et [6] (2005, 10), pour ne citer que les exemples les plus significatifs. Toutefois, selon [30] (2004, 195 s.v.Tartessisch), le tartessien ne relève pas des langues indo-europénnes. Le cœur de Tartessos se retrouverait dans la vallée inférieure du Guadalquivir et la région autour de Huelva. À cela s'ajoute une vaste zone périphérique qui s'étendrait de l'embouchure du Guadiana à l'est et le Cabo de la Nao à l'ouest. Son influence rayonne donc au-delà du territoire de Tartessos proprement dit (DNP 12/1, 39 s.v.Tartessos). Cependant, selon le DNP (12/1, 39 s.v.Tartessos) les débuts de Tartessos ne se manifestent clairement qu'à partir du IX e siècle. Il va d'ailleurs sans dire que dans les noms du type de Caesarobriga , Flaviobriga , Juliobriga , etc., il s'agit de formations hybrides qui remontent à l'époque romaine représentant donc des formations plus récentes (cf.[40] 1956 a, 13). Apparemment, en parlant de ces sites, l'historiographe Polybe, pour rehausser le triomphe militaire de Gracchus, se taisait sur ce fait ([16] 2012, 23). Il est par ailleurs intéressant de noter que le nom de la rivière Brexa trouve son équivalent aussi bien du point de vue étymologique que sémantique dans les noms des deux cours d'eau qui forment le Danube, à savoir le Brigach et le Breg (Duden GND, 63, 65 s.v.Breg , Brigach). On traitera ici uniquement - iés. À côté de ce dernier, il existe le suffixe quasi-homonyme - ès : la relation de ce dernier avec - iés avec lequel il semble étroitement lié fera l'objet d'une étude ultérieure : y a-t-il une variation diatopique ? Cf., dans ce sens, [41] (1956b, 114) : « il existe dans quelques régions dans le Midi de la France une dérivation moyennant - ès [...]. » Pour la celticité de - essos , cf. aussi sous peu Timmermann (à paraître). Pour avoir une idée de la multitudes des origines proposées pour les Indo-Européens, cf. la carte B: « Vermutete Urheimat der Indogermanen (Vorschläge seit 1960) » dans [49] (2002, 42). Renfrew (2003, 23) situe la diffusion de l'agriculture entre 7000 et 6500 av. J.-C. J'ai discuté ici en détail les raisons qui me font pencher pour le celtique. J'ai posé d'ailleurs aussi le thème artos 'ours' pour étymologiser les nombreux noms d' Artigue (particulièrement nombreux des deux côtés des Pyrénées) ainsi que le mot commun artigue ([43] 2018, 669‒672) . Mais voir Coromines OC (2, 259 s.v.Artiés) qui prévoit le basque arte 'chêne' comme étymon ou divers théonymes. Le fait que le nom de la ville voisine, à savoir Salardú, est indubitablement celtique est un autre argument en faveur de l'étymologie celtique d' Artiés.

By Jörg Timmermann

Reported by Author

Titel:
La celtisation de la péninsule Ibérique à la lumière de la toponymie et de la Celtic from the West hypothesis: Avec des regards sur l'indo-européanisation de l'Europe.
Autor/in / Beteiligte Person: Timmermann, Jörg
Link:
Zeitschrift: Zeitschrift für Romanische Philologie, Jg. 138 (2022-03-01), Heft 1, S. 228-244
Veröffentlichung: 2022
Medientyp: academicJournal
ISSN: 0049-8661 (print)
DOI: 10.1515/zrp-2022-0007
Schlagwort:
  • -essos
  • Anatolian hypothesis (Renfrew)
  • Artiés
  • briga
  • Celtic from the West hypothesis
  • dunum
  • hypothèse anatolienne (Renfrew)
  • indo-européanisation
  • Indo-Europeanization
  • Tartessos Language of Keywords: French
Sonstiges:
  • Nachgewiesen in: DACH Information
  • Sprachen: French
  • Language: French
  • Document Type: Article
  • Author Affiliations: 1 = Kurt-Schumacher-Ring 11, D-30627 Hannover, Germany
  • Full Text Word Count: 6501

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